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Les gnoses psychologisantes : le côté obscur du psycho-spirituel...

Notre rubrique ne saurait être utilisée pour accuser nommément et sans nuances aucun mouvement, aucune communauté, et encore moins celles qui justement ont fait avancer canoniquement la réflexion sur le sujet et que l'on retrouve bizarrement mises dans le même sac par des " accusateurs/polémiqueurs" mal informés et qui n'hésitent pas à accuser des saints canonisés, bien plus fiables qu'eux-mêmes.... Le rôle de juger sur pièce revient à d'autres lorsque la sainteté n'est pas encore reconnue. Notre rubrique se veut seulement un lieu de réflexion, et non de polémiques.

Gnose : du grec gnosis, connaissance révélee.



Qu'est-ce que la gnose ?

Les gnoses psychologisantes : le côté obscur du psycho-spirituel...
Saint Irénée de Lyon a écrit " Contre les Hérésies", avec comme sous-titre " de la gnose au nom menteur".
La gnose est une connaissance qui nie la transcendance de Dieu et applique à Dieu les connaissances ésotériques,
philosophiques les plus variées, parfois les plus délirantes qui soient. Voici un extrait du Contra Heresia, où l'on voit que l'utilisation du Christ et des chiffres, dans le style de l'énnéagramme soit disant chrétien n'est pas une nouveauté.

" L'émission de la Dodécade d'Eons est indiquée par le fait qu'à douze ans le Seigneur a discuté avec les docteurs de la Loi, comme aussi par le choix des apôtres, car ceux-ci furent au nombre de douze. Quant aux dix-huit autres Eons, ils sont manifestés par le fait que le Seigneur, après sa résurrection d'entre les morts, a vécu durant dix-huit mois — c'est du moins ce qu'ils disent — avec ses disciples. Les deux premières lettres du nom de Jésus, à savoir iota (= 10) et êta (= 8), indiquent aussi clairement les dix-huit Eons. De même les dix Eons sont signifiés, disent-ils, par la lettre iota (= 10), qui est la première de son nom. Et c'est pour ce motif que le Sauveur a dit : « Pas un seul iota ni un seul petit trait ne passera, que tout n'ait eu lieu. » 


Irénée a quelques pages très drôles, sans jamais manquer à la charité mais sans oublier d'être intelligent et d'une saine ironie. 
La gnose est toujours une connaissance qui demande une initiation, un dévoilement réservé aux initiés. Les initiés ont conscience ( selon eux) d'avoir découvert ce que les autres n'ont pas encore découvert. Par un système toujours clos sur l'homme, les chiffres, les révélations, le cosmos, la gnose applique à l'homme la mesure de l'homme...et à Dieu aussi ! Ainsi, Dieu devient un élément interne au système gnostique de la compréhension de l'univers et de l'homme auquel Il doit se plier et obéir, mais en réalité il s'agit toujours d'une mesure humaine, inventée par des hommes. Laissons à nouveau la parole à Irénée :

"Telle est leur doctrine, que ni les prophètes n'ont prêchée, ni le Seigneur n'a enseignée, ni les apôtres n'ont transmise, et dont ils se vantent d'avoir reçu la connaissance plus excellemment que tous les autres hommes. Tout en alléguant des textes étrangers aux Ecritures et tout en s'employant, comme on dit, à tresser des cordes avec du sable, ils ne s'en efforcent pas moins d'accommoder à leurs dires, d'une manière plausible, tantôt des paraboles du Seigneur, tantôt des oracles de prophètes, tantôt des paroles d'apôtres, afin que leur fiction ne paraisse pas dépourvue de témoignage. Ils bouleversent l'ordonnance et l'enchaînement des Ecritures et, autant qu'il dépend d'eux, ils disloquent les membres de la vérité. Ils transfèrent et transforment, et, en faisant une chose d'une autre, ils séduisent nombre d'hommes par le fantôme inconsistant qui résulte des paroles du Seigneur ainsi accommodées. Il en est comme de l'authentique portrait d'un roi qu'aurait réalisé avec grand soin un habile artiste au moyen d'une riche mosaïque. Pour effacer les traits de l'homme, quelqu'un bouleverse alors l'agencement des pierres, de façon à faire apparaître l'image, maladroitement dessinée, d'un chien ou d'un renard. Puis il déclare péremptoirement que c'est là l'authentique portrait du roi effectué par l'habile artiste. Il montre les pierres — celles-là mêmes que le premier artiste avait adroitement disposées pour dessiner les traits du roi, mais que le second vient de transformer vilainement en l'image d'un chien —, et, par l'éclat de ces pierres, il parvient à tromper les simples, c'est-à-dire ceux qui ignorent les traits du roi, et à les persuader que cette détestable image de renard est l'authentique portrait du roi. C'est exactement de la même façon que ces gens-là, après avoir cousu ensemble des contes de vieilles femmes, arrachent ensuite de-ci de-là des textes, des sentences, des paraboles, et prétendent accommoder à leurs fables les paroles de Dieu."

Qu'est-ce que les gnoses psychologisantes ?

Le champ d'argile, travail de la glaise, Photos site Adecap, association pour le développement du champ d'argile en psychologie.
Le champ d'argile, travail de la glaise, Photos site Adecap, association pour le développement du champ d'argile en psychologie.
 Notre époque voit fleurir les mêmes inventions et de plus subtiles, liées à l'avancée de la psychologie et des sciences humaines, mais des sciences humaines mal assimilées. N'oublions pas que psychologie et spiritualité sont deux domaines différents avec leurs lois propres, qu'il ne faut pas confondre ou intervertir.

Ce que nous appelons " gnoses psychologisantes" sont à la fois des gnoses qui déforment les sciences humaines et les mélangent avec des éléments de la foi déformés eux-aussi selon les principes expliqués par Irénée ci-dessus...Le fond de la question réside dans l'idée du Salut qui s'exprime dans ces mélanges. Le point commun de ces gnoses contemporaines ( mais pas si nouvelles que cela pour les procédés) est la connaissance de soi comme source du salut. Le salut par la connaissance de soi est impossible, le fait d'appliquer la mesure de l'homme ( les sciences humaines, valables et utiles mais uniquement dans leur propre domaine) au domaine spirituel brouille les cartes, et rend le discernement extrêmement confus. Ainsi, l'utilisation de techniques de lecture du subconscient, à la façon de Durckheim, par le modelage de la glaise permettant de déceler les problèmes de relation parentale ne saurait conduire à Dieu, mais seulement à une connaissance de soi toute relative. Le parallèle du vocabulaire psychologique repris par des thérapies " chrétiennes" est facile à faire : psychologie des profondeurs de Freud versus évangélisation des profondeurs, champ d'argile versus prière sur modelage, etc....
 

Le conflit des genres est inévitable.

Les sources psychologisantes de bien des propositions chrétiennes pastorales ont elles-mêmes parfois des sources ésotériques. La compétence professionnelle manque, ainsi que la compétence en théologie et en pastorale des sectes....Présentées comme des pastorales chrétiennes pour soulager les souffrances psychiques, les propositions chrétiennes vont se retrouver confrontées au problème de la compétence professionnelle agréée. Seules en réchapperont les structures chrétiennes pastorales entièrement professionnelles, composées de chrétiens qui agiront dans le domaine du soulagement de la souffrance psychique avec une compétence reconnue par l'Etat et leurs pairs non-croyants, comme jadis Pasteur ( qui récitait son chapelet tous les jours) fut aussi un grand savant. Les propositions pastorales axées sur la théologie, la formation à l'accompagnement spirituel axée sur la tradition chrétienne, le magistère, le catéchisme de l'Eglise catholique, l'antropologie chrétienne en plein essor grâce à Jean-Paul II, ont un bel avenir devant elles, dans leur domaine propre aussi.


 

Et pour finir, un des passages les plus drôles de Saint Irénée contre certains délires gnostiques...Mais aujourd'hui, il existe des livres qui font l'ennéagramme parfait du Christ...alors....

Les gnoses psychologisantes : le côté obscur du psycho-spirituel...
Ah ! ah ! hélas ! hélas ! Il est bien permis, en vérité, de pousser cette exclamation tragique devant une pareille fabrication de noms, devant l'audace de cet homme apposant impudemment des noms sur ses mensongères inventions. Car en disant : « Il existe avant toutes choses un Pro-Principe pro-inintelligible que j'appelle Unicité », et : « Avec cette Unicité coexiste une Puissance que j'appelle encore Unité », il avoue de la façon la plus claire que toutes ses paroles ne sont qu'une fiction et que lui-même appose sur cette fiction des noms que personne d'autre n'a employés jusque-là. Sans son audace, la vérité n'aurait donc point encore aujourd'hui de nom, à l'en croire ! Mais alors, rien n'empêche qu'un autre inventeur, traitant le même sujet, définisse ses termes de la façon suivante : Il existe un certain Pro-Principe royal, pro-dénué-d'intelligibilité, pro-dénué-de-substance et pro-pro-doté-de-rotondité, que j'appelle Citrouille. Avec cette Citrouille coexiste une Puissance que j'appelle encore Supervacuité. Cette Citrouille et cette Supervacuité, étant un, ont émis, sans émettre, un Fruit visible de toutes parts, comestible et savoureux, Fruit que le langage appelle Concombre. Avec ce Concombre coexiste une Puissance de même substance qu'elle, que j'appelle encore Melon. Ces Puissances, à savoir Citrouille, Supervacuité, Concombre et Melon, ont émis tout le reste de la multitude des Melons délirants de Valentin. Car, s'il faut accommoder le langage commun à la première Tétrade et si chacun choisit les noms qu'il veut, qui empêcherait de se servir de ces derniers termes, beaucoup plus dignes de créance, passés dans l'usage et connus de tous ? 

La souffrance des adeptes

L'ironie, même saine, ne suffit pas pour aider. Saint Irénée combat l'erreur aussi au positif en exposant ce qui est vrai et juste. On voit aujourd'hui dans le phénomène des sectes et des dérives sectaires la souffrance de beaucoup de personnes de bonne foi. Analysons le phénomène moderne ainsi : dans le psycho-spirituel actuel répandu même chez les catholiques, tout est tellement lié et imbriqué dans un processus de dérive qui ressemble assez à ceci :

1) un ego désobéit à la volonté du Christ et s'éloigne, alors que c'était peut-être la volonté divine qui était à l'origine d'une action bonne.
2) le mélange des fors et des types de compétences spirituelles et psychologiques commence, concomitant au début de la dérive avec des grâces réelles.( parfois aussi, il n'y a rien à l'origine d'autre qu'un égo surdimensionné...ou plusieurs.)
3) Les adeptes " séduits" peuvent se croire au début dans l'Eglise et en chemin de sainteté.
4) Le langage devient sectaire et apparaît de plus en plus en commençant par le noyau dur de la désobéissance : le pouvoir sur les personnes via le mélange des fors et /ou la gnose.
5) les blessures des uns et des autres " s'infectent" et les dysfonctionnements s'aggravent cachés par une désobéissance masquée de plus en plus retorse.
6) Les médias se repaissent des scandales ainsi provoqués et accentuent le repli sectaire et la honte qui retombe souvent sur des petites gens qui étaient de bonne foi ou manquaient de formation, ou bien ont été mal conseillés, y compris par des gens d'Eglise eux-mêmes dupés ou complices.
7) Personne n'accepte d'entendre qu'à l'origine siège un péché de désobéissance doublé progressivement d'un péché de gourou parce que loin de la volonté de Dieu.
8) de bons canonistes interviennent pour ôter les dérives et leurs conséquences.
9) les " adeptes" quittent dans de mauvaises ou de bonnes conditions, ou bien réforment quand la volonté de Dieu était bien à l'origine.

Si dans tout ce processus, l'Eglise intervient avec miséricorde, la réforme fonctionne, la dérive est résorbée.

Jeudi 8 Janvier 2015
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