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Cléricalisme : la paille, la poutre et le "religiosisme" (chaque vocation a son "isme")



Ne jamais rabaisser la vocation de l'autre

Le plus cléricaux au sens de ce que le pape François voudrait éliminer de la Curie et de toute l'Eglise ont une nouvelle tactique pour éviter de se convertir : accuser de cléricalisme le voisin, si possible celui qui justement ne l'est pas du tout, le moins clérical de tous. Dans ce baroud d'honneur, on cachera son propre "isme", sa poutre...

Alors, comment éviter de tomber dans cette absurdité d'une chasse à la sorcière cléricale (sic!) ? Assez simplement : le cléricalisme ne se repère pas à des marques de paternité mais à des marques d'abus de pouvoir : mélange du for interne et du for externe, absence de statuts précis, personnalité qui cumule les pouvoirs, etc. Mais si on accuse de cléricalisme le bon prêtre plein de paternité, l'évêque protecteur ou le religieux qui parle avec autorité parce qu'il le faut objectivement, on a affaire à cette tactique de celui qui dénonce la paille (ou même rien!) pour cacher la poutre de son oeil. La dénonciation du cléricalisme n'est pas subjective mais objective, à partir du droit et de faits.
 

Le cléricalisme a son équivalent dans chaque vocation

Chaque vocation baptismale peut avoir sa déformation comme le sacerdoce a sa déformation cléricale. Chez les religieux, ce sera le "religiosisme", pardon pour ce néologisme. Il donnera par exemple dans la Curie de 1927 (prenons un exemple ancien pour n'offusquer personne) l'interdiction par des religieux de voir renaître l'Ordre des Vierges en plein monde. On craignait pour l'hégémonie d'une vocation, les religieux, en interdisant une autre vocation, le célibat pour le Royaume vécu en plein monde. Il fallut attendre Vatican II pour que les vocations au célibat pour le Royaume autre que la vocation religieuse puissent se développer, et l'Ordre des Vierges en plein monde redevint libre d'apporter sa pierre à l'évangélisation.

Il en était donc, utilisons une image choc, du "religiosisme" comme de la guerre fratricide entre Russie et Ukraine : des racines communes, mais trop de différences pour que l'une des vocations accepte de se laisser assimiler. Le Célibat laïc pour le Royaume a donné naissance aux prélatures, à L'Ordre des Vierges en plein monde, aux instituts séculiers. Les Instituts séculiers sont un  bon exemple du droit d'une vocation à se gouverner elle-même ! Eux aussi durent lutter contre le "religiosisme" qui voulait les structurer en instituts religieux, en effaçant bien souvent leur caractère propre laïc.
Voilà pour le "religiosisme".

Tout ces "ismes" sont le signe d'une guerre d'hégémonie bien humaine d'une vocation sur une autre. Les nouveaux dicastères de la Curie échapperont-ils enfin à ces "ismes"? Cléricalisme, laïcisme, religiosisme, ritualisme, etc! Le symptôme de vouloir faire d'un évêque un simple prêtre, d'un prêtre un simple laïc, d'un laïc un enfant nous ramène au danger majeur : l'infantilisation. Elle consiste à mettre les uns sous la dépendance des autres, sans envisager le droit de s'auto-gérer de façon adulte (qui ne veut pas dire ne dépendre de personne, mais être responsable de soi, de sa vocation, de son "proprium").

Ainsi, l'Ordre des Vierges, des laïques pour la branche "en plein monde", dépend de l'évêque local, et non pas du dicastère de la vie consacrée en institut), ce qui est une heureuse évolution qui correspond à son sens profond et détache un peu plus l'Ordre des Vierges du dicastère de la vie consacrée. Le 11 Février 2022, un changement du code de droit canon, canon 604, a renforcé ce passage (enfin!) à une gestion adulte Ordo Virginum/evêque en ajoutant un paragraphe :
§ 3. La reconnaissance et l'érection de ces associations est, au niveau diocésain, de la compétence de l'Évêque diocésain sur son territoire, et, au niveau national, de la compétence de la conférence épiscopale sur son territoire. Le but est d'éviter le "religiosisme" qui tend trop souvent à faire de ces associations de nouveaux instituts séculiers ou religieux, loin de la vocation propre de l'ordre des Vierges en plein monde. Le motu proprio précisons-le, traite de bien d'autres questions et vise le "centralisme", en opérant une saine décentralisation, comme l'indique son introduction. "Attribuer des compétences, qui concernent des dispositions du code visant à garantir l'unité de la discipline de l'Église universelle, au pouvoir exécutif des Églises et des institutions ecclésiastiques locales, relève de la dynamique de communion ecclésiale et valorise la proximité. Une salutaire décentralisation ne peut qu'aider et favoriser la dynamique de la vie de l’Église, sans préjudice pour la communion hiérarchique" (Competentias quasquam decernere, 11 février 2022)

Autre danger : l'uniformisation. Celle qui veut faire entrer la vocation de l'autre dans la case pré-conçue déjà connue. Ainsi, on voudra faire entrer toutes les prélatures (territoriales et personnelles) dans la même case, par exemple en les faisant toutes dépendre du dicastère du Clergé. Mais si la prélature territoriale ne doit pas être celle d'un évêque (qui serait un évêché dans un autre évêché), la prélature personnelle non territoriale peut avoir un évêque à sa tête... Le même motu proprio, qui complète la réforme de la Curie sur le plan canonique en déblayant le terrain précise qui peut incardiner et élargit cette possibilité afin d'éviter tout clerc acéphale (et potentiellement instable ou plus grave, pervers). Ainsi, la décentralisation envisagée n'est pas une perte de vigilance mais une subsidiarité efficace à tous les échelons. Elle lutte contre le centralisme d'une part, le noyautage et la dispersion d'autre part.

Soulignons encore une fois combien un dicastère sur le Célibat pour le Royaume nous semble toujours manquer cruellement pour mettre en commun les trésors du célibat en dépassant les dicastères vie consacrée et clergé ainsi que laïcs, trop 'disciplinaires" et "spécifiques" pour assurer une formation avec une vue d'ensemble positive sur le Célibat pour le Royaume.
 

Apprendre à aimer la vocation de l'autre comme la nôtre

Aucune vocation n'est le paradigme de celle des autres : seul le baptême est la vocation paradigmatique. A partir de cette égalité, la communion n'empêche pas la diversité, bien au contraire. 

La réforme de la Curie va certainement ajuster des erreurs. Elle va débusquer des abus en "isme", pas seulement dans le cléricalisme mais aussi dans le religiosisme, le laïcalisme, etc . La charité et l'histoire montreront qui sont les saints, pour le bien de l'évangélisation.


Apprenons à aimer la vocation de l'autre comme la nôtre, à la connaître et évangélisons ensemble !

AC  

Lundi 21 Mars 2022
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