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Saint Joseph, le libre arbitre, le succès et le bonheur



Saint Joseph était-il libre de dire non ? Son destin particulier d'époux de la mère de Dieu peut poser question : après tout, quelle était la liberté de Joseph ? Comme Marie, son oui, son fiat, impliquait de remettre sa liberté à Dieu. Joseph a fait confiance. Il a renoncé à un chemin tracé d'avance, facile à deviner, semblable à celui de tant de jeunes papas juifs de son temps. Certainement un chemin de bonheur.

Cela fait penser à un excellent film qui s'appelle l'Agence. Un homme, destiné à devenir sénateur et président des USA, tombe amoureux d'une femme charmante, une danseuse. A partir du moment où il la recherche, au prix de sa carrière, entrent en scène des personnages que le film définit comme des sortes d'anges. Mais des anges modernes : au lieu de préserver la capacité de libre arbitre et de bien, comme le font nos anges gardiens, ils veillent à ce que le destin de chacun suive à la lettre un plan pré-établi. Ces personnages provoquent des événements anodins ou plus graves qui changent le cours de l'histoire personnelle selon leur plan à eux. Le couple, avec Matt Damon comme héros bataillant pour son amour et sa liberté, devra contourner tous les obstacles pour gagner le droit au libre arbitre. Au lieu de devenir Président pour lui, célèbre chorégraphe pour elle, ils optent pour rester ensemble en mettant échec et mat l'Agence. Le chemin de bonheur est donc différent de celui du succès programmé. Comme le disait le docteur Schweister, " le succès n'est pas la clé du bonheur. c'est le bonheur qui est la clé du succès".

Joseph, lui, n'est pas prisonnier d'un déterminisme que Dieu lui aurait imposé. Il est au contraire si libre, qu'il peut renoncer à son plan personnel pour entrer dans le plan de Dieu. Le fiat de Joseph est, à la suite de celui de Marie, pleinement libre. Le plan de Dieu ne le contraint pas, contrairement au plan de l'Agence ( la nouvelle de Philip K. Dick dont le film s'inspire s'appelle Adjustement Bureau, avec l'idée d'une correction permanente des actions, donc d'une contrainte permanente). Notons que cet ajustement de l'homme à un plan pré-déterminé est un des drames de notre époque : plutôt que d'ajuster la raison et le bon sens à la protection de l'homme, de sa santé, de l'environnement, on ajuste l'homme, et la planète entière, aux chiffres de production, à la pollution, aux finances. 

Joseph, lui, est juste, et non pas " ré-ajusté". Ce n'est pas Dieu qui l'ajuste s'il dévie d'un plan établi de salut, mais Joseph qui s'ajuste librement au plan de Dieu. Cela laisse à Joseph, comme à chacun de nous, la possibilité de l'échec, de dire non. Cela laisse aussi la possibilité de choisir à chaque instant librement de poser des actes personnels et libres, et de dire oui au plan de Dieu si on est d'accord. C'est la grande force de la liberté de résister à l'ajustement déterministe, techniciste, productiviste, consumériste, etc. ... Joseph n'a pas connu de succès apparent, grandiose, mais le bonheur a été la clé de son succès. Le bonheur d'être avec Marie, avec Jésus, a rempli sa vie au point de lui donner un succès bien plus immense que celui d'une réalisation humaine issue de ses propres efforts. De la vocation à être un papa comme tous les papas de son temps est née celle d'être le père adoptif de Jésus. La paternité de Joseph a pris ce jour-là un tour inattendu et immense, mais invisible aux yeux du succès humain.

Quand on est d'accord avec le plan de Dieu, Lui-même vient soutenir notre liberté. Elle lui est si précieuse et importante, cette liberté, qu'Il a préféré prendre le risque du péché et de la rupture, plutôt que de nous contraindre par le déterminisme. Il a préféré souffrir la Croix plutôt que nous priver de notre liberté. En le suivant librement, nous retrouvons la clé du bonheur.

 

Lundi 6 Avril 2020
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