Origines de Lourdes en lien avec le Puy : le Sarrasin et la Reine du Ciel
Nous retranscrivons ici un extrait du livre " Merveilles de Lourdes" qui raconte avec talent -comme tous les récits de ce livre dédié à l’histoire de Lourdes-un événement historique dont les habitants du Puy gardent la mémoire et la fierté : le saviez-vous ? La ville de Lourdes est reliée mystérieusement au Puy-Sainte-Marie…voici l’histoire : Le Sarrasin et La Reine du Ciel Turpin, l’évêque du Puy-en-Velay, aumonier de Charlemagne, et le moine Marfin, émaillent d’interminables conversations les langueurs de l’été 778, au monastère de Lavedan. _Ce que je m’apprête à te raconter, frère Marfin, tu n’es pas obligé de le croire. Mais je t’en prie, écoute-moi avec ton coeur et ta foi. L’évêque marque une pause. _La citadelle de Mirembelle [1] est un édifice extraordinaire. Ses constructeurs furent divinement inspirés, tant l’habileté et l’intelligence avec lesquelles ils la conçurent en font une place stratégique quasin imprenable. Grâce à elle, un simple prince, Mirat le Sarrasin, a pu résister pendant des mois au terrible assauts de la puissante armée de Charlemagne dont je faisais partie. Vraiment, Marfin, ce siège semblait durer depuis toujours. Et si l’imposante roche rendait impossible la sape des fondations, les ressorts et les cordes des balistes, eux, fonctionnaient à plein, lançant pierres, poutres et charognes par-dessus les épaisses murailles. Mais aucun instrument de guerre ne venait à bout de ses puissantes fortifications. Or, ce prince sarrasin n’était probablement pas le mécréant que l’on imaginait : un homme capable de repousser les limites du supportable, d’obtenir le soutien indéfectible des siens, de leur inspirer la force et le courage de combattre à un contre dix….le penses-tu si éloigné de Dieu ? _Certes, l’homme a de l’étoffe. De là à en faire un homme de foi, non, je ne crois pas, répond Marfin les sourcils arqués par le septicisme. Pourquoi n’a-t-il pas prêté allégeance à Charles le Grand ? Pourquoi laisser obstinément flotter son étendard et infliger aux siens les affres de son orgueil ? _Je pensais comme toi, jusqu’à ce qu’un événement assez singulier auquel j’ai pu assister, vienne ébranler mes certitudes. Marfin, ayant eu vent dudit incident, contemple l’évêque avec un air dubitatif. _Qu’un aigle majestueux survole la forteresse et dépose un saumon encore vif aux pieds de cet infidèle, n’est-il pas un fait troublant ? reprend Turpin. Quand Mirat le ramasse, son attention se porte instinctivement vers l’origine du présent. Cherche-t-il une trace de l’aigle si généreux ? Non, son regard est immobile. Il fixe le ciel. Un indicible sourire se dessine sur son visage. Du haut des remparts, il regarde la tente de notre auguste roi et crie : " Comment quitter les largesses de cette terre ? Autour de moi, je ne vois que profusion et fertilité. Ce saumon est magnifique ! Mais ce n’est qu’un parmi des centaines. Prenez-le, la nature semble moins charitable avec vous !" Et il jette le poisson en notre direction. Pour les soldats Francs, atteints dans leur chair, las d’un siège sans fin, c’est le coup de grâce. Chez notre roi aussi le doute commence à germer. Tous songent à reculer. C’est à ce moment précis que je décidai d’aller vers ce Mirat qui prétendait posséder abondance et force. Plusieurs détails, imperceptibles pour mes compagnons, m’autorisaient à croire en la présence de Dieu à l’intérieur de ces fortifications. Je n’aurais qu’à parler, et Dieu ferait le reste. J’en étais convaincu. Je demandai alors à notre roi de me laisser tenter une ultime manoeuvre. Les échecs successifs et l’insupportable idée de la retraite suffirent à le persuader. J’entrai bientôt seul à la rencontre de ce prince sarrasin. Devant le délabrement de ses troupes, affamées, épuisées, malades, je compris que je ne ressortirais de là vivant que si mon intuition était juste, car jamais Mirat ne me laisserait révéler sa faiblesse à l’extérieur de son camp. Il m’attendait. Prince Mirat, tout comme mon roi, j’admire le courage et la loyauté que tu inspires à tes hommes. Tu as prévenu que jamais tu ne te soumettrais à un mortel, quel qu’il soit, et tu as tenu parole. Je ne viens donc pas m’entretenir de cela, mais te parler du hasard. Ce matin, un aigle a déposé à tes pieds un superbe saumon…" Mirat, étrangement serein, me coupa la parole : " C’est exact. Je n’y ai pourtant pas vu de hasard. j’y ai vu un signe. Cet aigle, dont les serres laissent échapper un si beau saumon…Les saumons remontent les cours d’eau pour perpétuer leur race et meurent peu de temps après. Pourquoi ne restent-ils pas en pleine mer. L’espace de liberté est infini, la nourriture abondante…C’est comme si le point central, le sens de toute leur existence se situait là : souffrir en allant à contre-courant, et enfin donner la vie. NOus souffrons tous ici, mais à quoi pourrions-nous donner naissance qui surpasse le simple fait d’exister ? Le sais-tu ?" "Oui, répondis-je. A une cité libérée de tout fief terrestre, une cité ne relevant que de la plus noble Dame qui fût : Sainte Marie du Puy, Mère de Dieu, à laquelle même Charlemagne, le plus illustre des mortels, se soumet. Deviens son chevalier et offre au pays de Bigorre la plus glorieuse et la plus juste des gouvernances. L’histoire se souviendra de toi comme du fondateur d’une cité divine, n’appartenant qu’à la Reine du Ciel." Pour la seconde fois de ce jour extraordinaire, Mirat sourit. La suite, tu la connais, frère Marfin. Mirat, baptisé, s’appelle aujourd’hui Lorus. La cité, théâtre de cet authentique miracle, portera bientôt son nom, Lourdes, et deviendra le fief céleste et exclusif de la Vierge Marie, sainte Mère de Dieu pour toujours.
Notes[1] forteresse médiévale du pays de Bigorre, ancêtre du château de Lourdes. Samedi 27 Février 2010
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