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Vocation : état de vie consacrée ou consécration d'état de vie ?



On ne parle plus d'état de perfection.

L'appellation " état de perfection" s'était au fil des siècles resserrée sur le sacerdoce et la vie religieuse, confondus avec une sorte de caste de parfaits ratifiée par l'ordination d'une part, les trois voeux d'autre part. Basée sur une analyse sociale de la vocation et sur des modèles sociaux, la théorie de l'état de perfection est arrivée à l'inverse exacte de ce qu'elle recherchait : une exclusion de la recherche de sainteté pour ceux qui ne prenaient pas le chemin le plus difficile ( en apparence, car se sanctifier dans le mariage n'est pas plus facile!).
Rechercher à se donner de la meilleure manière a poussé paradoxalement à créer une hiérarchie des vocations...

Le baptême, seule consécration parfaite.

Le baptême, de part sa dimension trinitaire, est la vocation " parfaite". Il est la vie consacrée par excellence, la consécration en vertu de laquelle tous les fidèles se sanctifient. Alors, qu'appelle-t'on, après l'expression " état de perfection", un " état de vie consacrée"? 
On pourrait parler d'une sorte de d'élargissement actuel du vocabulaire, proportionnellement inverse au rétrécissement vocationnel des siècles passés : pour rappeler à tous l'appel universel à la sainteté, certains reçoivent une mission et un " label" de " vie consacrée" : là encore, la perfection du don et de la réponse à l'appel ne sera pas dans une " caste" de parfaits, religieux ou non, mais dans un nouvel élargissement voulu par Vatican II, retour à la source baptismale et parfaite de toute vocation, le baptême.

Tous s'encouragent à la perfection de la charité et à la sainteté.

Ainsi, dans l'Eglise, il n'y a pas les baptisés " consacrés" qui vivent la " vie consacrée" à côté de baptisés qui vivraient une vie non consacrée. Ce serait réduire à pas grand chose la puissance de l'appel à la sainteté pour tous les baptisés. 
Il n'y a même pas ceux qui auraient une vocation plus " consacrée" que celle des autres pour leur rappeler leur appel à la sainteté, mais chaque vocation est un rappel de l'appel commun, l'appel universel à la sainteté. La sainteté des gens mariés soutient celle des religieux ( il suffit de voir la famille Martin, Louis, Zélie, Thérèse et ses soeurs, dont les vocations sont mutuellement un perpétuel échange de soutien et d'encouragement à la sainteté). La sainteté des célibataires pour le Royaume soutient celle des couples et des parents, celle des laïcs en plein monde est une extension apostolique de la prière des moniale cloîtrée, etc. 

Consécration de tous les "états" de vie.

Donc il n'y a pas dans l'Eglise un état de vie consacrée, mais une consécration de tous les états de vie. Les religieux, les instituts séculiers, les nouvelles formes de vie ( consacrée, comme on le dit, mais par le baptême, comme tout le monde dans l'Eglise!), les ermites, les communautés nouvelles, les familles chrétiennes, les célibataires chrétiens, tous sans exception sont appelés à consacrer leur mode de vie, qui n'est pas un état à part, mais une partie d'un ensemble extrêmement diversifié et vivant qui s'appelle l'Eglise et ou tout communique et communie.

Que signifie alors consécration de la vie chrétienne?

La réponse est théologique et concrète, et mériterait de longs articles. Mais la base est tout simplement la vocation chrétienne en soi, vivifiée par le baptême et les sacrements, incarnée dans tous les modes possibles de vie chrétienne, d'où une diversification, une pluralité croissante ( qui selon Urs Von Balthazar est une caractéristique de l'Esprit Saint, car l'Esprit Saint unit sans uniformiser et est " symphonique"), la vie consacrée est tout simplement synonyme de vie baptismale et de perfection chrétienne.



 

Peut-on encore parler de vie consacrée pour seulement quelques catégories de personnes?

Oui, si ces catégories de personnes sont un humble rappel...! Et si leur mission est bien de re-diffuser cette vérité symphonique de la consécration baptismale. L'égale dignité de chaque vocation doit être bien affirmée, sinon, on va vers des erreurs vocationnelles,des choix par héroïsme et grande générosité, mais éloignés de l'appel personnel, des désillusions, l'idée fausse de déchoir quand on ne rentre pas au Carmel ou chez les Chartreux, etc! D'où la nécessité de ne pas réserver l'adjectif " consacré" à quelques uns mais de bien le redonner à tous avec chacun sa spécificité, son mode de vie, sa manière de consacrer à Dieu chaque instant de sa vie, que ce soit dans un cloître ou en tant que laïc en plein monde séculier. Une religieuse, Thérèse de Lisieux, a ré-ouvert en son temps cette voie en initiant la " petite voie" qui n'est autre qu'une manière de consacrer sa vie entièrement à Dieu, dans chaque acte, sans pour autant être appelé au Carmel ou au célibat pour le Royaume. Paradoxalement, Thérèse a rendu ( avec d'autres saints!) aux laïcs la grandeur et l'égale dignité en terme de sanctification et de consécration baptismale pleinement vécue de leur vocation propre.

Voilà pourquoi la pastorale des vocations doit peu à peu passer de l'expression "état de vie consacrée", trop exclusive et restrictive, à l'expression concrète de " consécration de toute vie chrétienne", sans avoir pour cela besoin de passer par des " états", mais plutôt par des conditions juridiques et canoniques de plus en plus diversifiées et respectées dans leurs spécificités. C'est ce qu'on appelle le " proprium" de chaque vocation, plus apte à évangéliser et attirer que la notion d'état de vie, trop vaste et générale.

Anne Céline Denis


Samedi 1 Octobre 2016
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