Année sacerdotale, portrait de prêtre en ChineLe père Jean Wang a 40 ans. Il arbore fièrement son col romain, en pleine rue de sa petite ville du centre de la Chine , et vient nous chercher à la gare. Dans sa voiture, ( le seul luxe indispensable avec son téléphone portable), il nous présente à deux nièces qui viennent aider à l’occasion du Ier mai. On attend dans son petit sanctuaire dédié à Marie plus de 3000 participants. _Nous mettons un point d’honneur à servir du riz et des légumes à tous les pélerins pour cette fête. Certains ont marché des jours pour venir jusque chez Marie. beaucoup viennent de régions lointaines et ont fait un ou deux jours de train pour venir ici. C’est un pélérinage que l’on fait en famille. Des mamans viennent avec leur enfant malade pour prier Marie….
Nous sommes à la veille du pélerinage.
Tous les paroissiens du village, qui est presqu’entièrement chrétien, s’activent. Le père Wang organise, répartit les tâches, aide à porter l’autel en dehors de la petite chapelle sur la grande esplanade, répond au téléphone, vérifie que les hommes chargés de la circulation et de la sécurité sont prêts, félicite les uns, encourage les autres, et s’occupe en plus de nous avec toute l’affabilité et la politesse chinoise. Mon amie Francisca ( une chinoise de Mongolie intérieure) et moi-même allons à la découverte des lieux. Notre chambre participe du même standing que le village et le sanctuaire, c’est-à-dire que tout est très simple et pauvre, dans cette région reculée et oubliée du pouvoir central. Le père Wang habite dans une pièce rustique, et l’on sent que l’hiver ( facilement la température avoisine moins 20 degrés) est très rude. En poste au Sanctuaire depuis 7 ans, le père Wang ne possède de plus que ses paroissiens que la voiture qui lui permet de les visiter. _Au début, ils étaient étonnés de me voir avec une voiture, mais après, ils ont vu que c’était pour le service et l’évangélisation… Il nous explique que ses paroissiens peuvent lui téléphoner à tout moment, il se doit alors toutes affaires tenantes d’aller les aider, les écouter, leur donner les derniers sacrements. En bon chinois, il ne dira jamais non, mais son emploi du temps est celui d’un homme mangé. Sa santé n’est pas toujours bonne : le coeur parfois lui joue de drôles de tours. Cela ne l’empêche pas de grimper dans la montagne, d’être sportif et dynamique. Il récupère après, quand le corps ne suit plus très bien.
Fier à juste titre de son sanctuaire, le père Wang nous entraîne dans la montagne au dessus du Sanctuaire. Un magnifique chemin de croix domine le village et le lac, ressource principale de ce village de pêcheurs. Nous ferons une magnifique promenade sur le lac, les bateliers étant tous des paroissiens que nous voyons aussi à la messe du matin. ( voir les photos du portfolio)
Il faut dire qu’en Chine, le chemin de croix est une dévotion que l’on fait après ou avant la messe bien plus souvent que chez nous. Le père Wang appartient à l’Eglise officielle, mais il connait les autres réalités de l’Eglise en Chine et son sanctuaire est un lieu d’unité. Les prêtres officiels, dont le représentant de l’évêque, ne posent pas de questions à certains prêtres venus en pélerinage pour le 1er Mai. Marie accueille tous ses enfants. La police locale, avec laquelle le père Wang est en bons termes, n’enverra pas même un policier mais passera un coup de fil dans la matinée. Francisca, qui vient d’une région bien plus difficile de la Chine, n’en revient pas et s’attend à voir des policiers comme c’est fréquent chez elle. Le père Wang la rassure et lui explique qu’il n’a pas de problèmes avec la police. Le 1er mai, les pélerins innombrables arrivent. On en comptera environ 3000…ils traversent le village à pied ou en voiture. Le parking déborde de cars de tous gabarits. Si les fondateurs du pélerinage et du Sanctuaire, des prêtres polonais au XIXe siècle, voyaient cela, ils seraient bien heureux. Le Père Wang a fait placer en leur mémoire une stèle de marbre noir qui relate en caractères chinois l’histoire du Sanctuaire et sa renaissance dans les années 90. Les pélérins passent devant et la lisent attentivement. Mais leur but est ailleurs. Le Sanctuaire ressemble réellement et spirituellement à Lourdes, tant aimée des Chinois. Le père Wang a fait placer une fontaine et des robinets à côté de la grotte et chacun peut boire l’eau et s’y laver ( le plus concrètement du monde !) mais aussi en démarche spirituelle. La Vierge de Lourdes parle aux Chinois car elle reprend les symboles de la Miséricorde et de la Maternité, ainsi que ceux de l’eau qui purifie. La culture chinoise comprend Lourdes presque naturellement et on trouve partout des reproductions de la Grotte de Massiabelle, construites avec amour et décorées à la chinoise. Des malades, des infirmes, des enfants, des vieillards, beaucoup de jeunes. La fanfare et les pétards ! Le bruit est si assourdissant qu’il est impossible de se parler à l’approche de la procession des jeunes filles, des enfants de choeur et des prêtres. Nous sommes en Chine, tout est semblable et tout est différent. Mais devant la reproduction de la grotte de Lourdes, la ferveur est la même. Le père Wang nous raconte des cas de guérisons les années précédentes. La foi de ses pélérins le touche et le booste pour faire plus : il envisage de construire à côté du chemin de croix un "chemin de Marie" avec les 20 mystères du Rosaire et nous montre l’emplacement prévu. Il est aussi en train de construire des chambres pour les prêtres et les consacré(es) désirant se reposer au Sanctuaire et se ressourcer. La journée s’achève et les pèlerins rentrent chez eux. Le père Wang remercie les prêtres amis qui ont confessé toute la journée. De longues queues pour la confession ont perduré du matin au soir, sous un soleil de plomb. Les paroissiens nettoient et rangent. Une jeune paroissienne de 15 ans nous demande de pouvoir prendre des photos avec nous et nous offre des glaces, juste devant sa maison. Une maison chrétienne avec des symboles chrétiens fièrement affichés et bien sinisés. On peut reconnaître le signe IHS qui remplace les symboles non-chrétiens dorés habituels sur les portes chinoises. Le père Wang partage au quotidien la vie simple de ses paroissiens et tous sont chez eux au Sanctuaire Marial. Sur la route poussiéreuse qui nous ramène à la gare quelques jours plus tard, nous nous retournons pour un dernier regard sur le lac, le Sanctuaire, le village et le Chemin de Croix dans la montagne. Nous reviendrons, si Dieu le veut. Le père Wang nous a invités : il y a toujours de la place pour les pélérins, y compris ceux qui viennent d’Europe. Anne et Francisca voir http://www.anneedusacerdoce.org/ Samedi 27 Février 2010
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